miércoles, 14 de enero de 2009

El Acordeón

Mediodía en las calles de Saint Louis. En las aceras se agolpan comerciantes y tenderos, transeúntes y turistas, del todo indiferentes a la pequeña maravilla que cada día acompaña sus rutinas. Y es que, desde aquella tímida esquina que apenas se deja ver entre el trasiego, tu inadvertida presencia se hace indispensable en la vida del frecuentado barrio parisino. Y tu gemir se convierte en el canto de una ciudad.


Gimes y arrancas delirios y quejidos, envolviendo con tu rasgada voz noctámbulas historias que sirven de sustento a aquél que osa acompañar tu llanto. Gimes, y tu gemido se traduce en un aluvión de caricias que se precipitan hacia la siempre llana y reconfortante cadencia que, huérfana de esplendor, aguarda expectante el eco de un nuevo sollozar. Gimes, y en tu grito se cobijan un millar de parásitos que sólo en ti parecen encontrar dirección en su solitario deambular.

Cae la tarde en los alrededores de Saint Louis. Las dóciles aguas acompañan en un murmullo el testimonio de tus ausencias. La isla, ajena pero testigo, se adormece en un acompasado mecer que será preámbulo de un nuevo lamento. Ya entre sombras, en la isla de Saint Louis sólo se escucha tu llanto.

L’art doit-il être beau?

La relation entre la beauté et l’art a toujours été une question très contestée parmi les penseurs et les artistes à cause de l´évolution de la notion d’art tout au long des années. En effet, l’art et l’esthétique ou la recherche de la beauté ont toujours été très liés puisque historiquement l’art a été conçu comme l’instrument utilisé par les hommes pour chercher la beauté, cette dernière étant considérée comme une des vertus vers laquelle l’activité humaine doit se diriger. Certes, depuis Platon et les penseurs grecs la beauté a été conçue comme ce qui permet à l’homme de transcender sa condition humaine et de s’approcher au divin, ce qui conduit l’âme vers la Vérité entendue comme vertu morale par excellence. Aristote, en fait, lorsqu’il parle d’art, souligne qu’on doit distinguer entre l’acte même de produire (l’art proprement dit) et le résultat d’une telle production (l’œuvre), bien que tout le processus créatif doive être conduit vers la recherche du « beau » (« L’éthique à Nicomaque »). Ainsi, selon la notion classique d’art l’artiste est l’intermédiaire ou intercesseur entre la sphère mondaine et le divin, qui était conçu comme l’aspiration maximale de l’humanité : l’art était don l’instrument utilisé pour s’approcher de la beauté, une des vertus intégrantes du divin.

L’objectif de s’approcher du divin grâce à l’art a été aussi une des caractéristiques les plus importantes de l’art du Moyen Age, bien que désormais l’art fasse usage pour cela de l’objet de l’œuvre lui-même. En effet, les peintres et les sculpteurs créent des œuvres afin de louer Dieu et de s’approcher de la vertu (la beauté), dont l’objet est composé par les épisodes de l’histoire sainte. Ainsi, l’artiste cherche la beauté au moyen de ses œuvres, qui ont un objet religieux, afin de chanter la gloire et la grandeur de Dieu. En conséquence, seul l’art beau est bon parce seul ceci est valide pour louer Dieu.

Cependant, à la Renaissance cette notion d’art se transforme radicalement à cause du changement dans la notion de l’homme et du monde. En effet, l’homme devient le centre de la création à la place de Dieu. Les œuvres sont de plus en plus mondaines et passées au crible de la science ; bien que l’artiste essaie encore de trouver la beauté, cette dernière est désormais conçue comme un plaisir empirique ou sensoriel et pas comme une vertu. On peut trouver aussi une telle sécularisation de la recherche du beau par l’art dans le siècle des Lumières, qui transforme l’art en un instrument pour la recherche de la vertu, bien que ce soit une vertu rationaliste. Certes, les Lumières réussissent à mettre la raison à la place de Dieu et donc les vertus qui désormais doivent être recherchées ne sont plus des vertus théologales (la foi, l’espoir et la charité), cardinales (la prudence, la justice, la tempérance et la force) ou morales, mais des vertus ou principes nés de la Révolution et des Lumières. Ainsi, la liberté, l’égalité, la vérité ou la justice sont les objectifs de tout acte créatif, bien que ce soient des objectifs conçus au sens rousseauiste et libéral du terme : la déification de la raison annule la beauté en tant que valeur morale ou transcendante et absolue pour la transformer en le résultat d’un processus rationel. La beauté est alors perçue comme ce que chacun, grâce à la perception sensitive de la réalité passée au crible de la raison, considère comme telle. Ainsi, avec la naissance du relativisme philosophique commence le conflit sur la notion de l’art.

Or, depuis la fin du XIXe siècle le relativisme a augmenté considérablement et en conséquence la beauté devient une valeur subjective et individuelle, qui n’est que ce que l’artiste considère comme telle. La beauté ou le « beau » n’est plus une valeur objective et mesurable qui puisse inspirer le processus créatif de l’artiste et la notion de l’art lui-même : la relation entre l’art et la beauté chancelle car la notion de cette dernière devient relative et subjective.

En effet, on trouve certains mouvements artistiques qui se basent sur la recherche de la définition de l’art elle-même, comme par exemple l’art conceptuel. Ainsi, ce groupe d’artistes, parmi lesquels on peut trouver Joseph Kosuth, On Kawara ou Sol LeWitt, a pour première exigence d’analyser ce qui permet à l’art d’être art, c'est-à-dire la quintessence de l’art. Selon Kosuth, par exemple, « il est nécessaire de séparer l’esthétique de l’art parce que l’esthétique concerne des jugements sur la perception du monde en général » ; ainsi, « les autres fonctions apparentes de l’art [peinture de thèmes religieux, portraits d’aristocrates ou fonction ornementale, parmi d’autres] usaient de l’art pour dissimuler l’art. (…) Les considérations esthétiques sont en fait toujours étrangères à la fonction d’un objet ou sa raison d’être.» Ainsi, on peut constater que depuis Duchamp et ses « ready-made » l’intérêt de l’art ne porte plus sur la forme du langage, c'est-à-dire sur l’apparence externe ou esthétique de l’œuvre, mais sur ce qui est dit : selon Kosuth en fait « tout l’art (après Duchamp) est conceptuel ».

Certes, on peut constater grâce à l’analyse de l’évolution de la notion de l’art au long des années que la relation si contestée entre l’art et la beauté a son origine dans le relativisme, en la subjectivisation de la réalité. En effet, si l’on élimine les notions, valeurs et principes objectifs, on élimine l’essence même des choses et de la réalité, cette dernière devenant un seul acte de la volonté, un seul acte cognitif. La subjectivisation de la beauté a fait que l’art a perdu le composant le plus important de sa nature, c'est-à-dire la raison d’être de l’art incarnée en la recherche de la beauté comme valeur supérieure. Tout cette relativisation portée jusqu’à l’extrême a été la cause de la déconstruction conceptuelle, à la manière cartésienne, qui a permis de s´interroger sur des notions telles que l’art ou le beau jusqu’à l’absurde (par exemple, la tautologie de Joseph Kosuth « l’art est la définition de l’art ») et qui a conduit aux notions conceptuellement vides. La question qu’on doit se poser n’est pas celle de savoir s´il existe une relation nécessaire entre l’art et la beauté, mais celle de la définition même de l’art.